La faute grave, c’est quoi exactement ? Le guide complet pour comprendre (et réagir).
Dans la bouche de certains employeurs, « faute grave » sonne comme un couperet. Dans celle des salariés, c’est souvent synonyme de choc, voire d’injustice. Mais que signifie réellement la faute grave en droit du travail ? Est-ce une notion automatique ? Subjective ? Peut-elle vraiment tout justifier, notamment un licenciement sans préavis ni indemnité ? Et surtout, comment savoir si elle est réellement constituée ? Voici le guide complet et concret, pour y voir clair en 2025.
Qu’est-ce qu’une faute grave ?
La faute grave est une violation des obligations du contrat de travail d’une telle importance qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, même pendant la durée du préavis.
Elle permet à l’employeur de :
- Licencier sans préavis :
- Ne pas verser l’indemnité de licenciement ;
- Mais attention : elle ne supprime pas le droit aux congés payés acquis.
Exemple concret : Un salarié insulte violemment un client devant témoins. L’employeur peut alors considérer qu’il n’est plus possible de le maintenir en poste, même temporairement.
Les critères retenus par les juges
Les prud’hommes et les cours d’appel examinent au cas par cas :
- La gravité des faits ;
- Le contexte (ancienneté, antécédents, stress, état de santé…) ;
- La proportionnalité entre la faute et la sanction.
Exemple : Un salarié qui s’endort une fois à son poste après 10 ans d’ancienneté et sans avertissement préalable ne pourra, sauf circonstances exceptionnelles, être licencié pour faute grave.
Des exemples concrets de fautes reconnues comme graves
- Vol d’un bien appartenant à l’entreprise ;
- Agressions physiques ou verbales envers un collègue ou un client ;
- Refus répété et injustifié d’exécuter des tâches relevant du contrat ;
- Ivresse manifeste sur le lieu de travail ;
- Harcèlement moral ou sexuel ;
- Concurrence déloyale.
Exemple : Une salariée refuse catégoriquement de participer à une réunion client essentielle, malgré plusieurs rappels et sans justification. Si cela nuit à l’entreprise, la faute grave peut être reconnue.
Des exemples où la faute grave a été écartée
- Une seule absence injustifiée après 5 ans sans incident ;
- Un échange tendu mais isolé avec un supérieur hiérarchique ;
- Des propos inappropriés dans un cadre informel, sans intention de nuire ;
- Une erreur professionnelle sans volonté de nuire ni réitération.
Exemple réel : Un salarié licencié pour faute grave après avoir laissé une caisse déficitaire de 20€ a obtenu gain de cause aux prud’hommes : les juges ont estimé que l’erreur était humaine, isolée, et que la confiance pouvait être maintenue.
Peut-on contester une faute grave ?
Oui. C’est même fréquent. Le salarié peut saisir le conseil de prud’hommes dans les 12 mois du licenciement et demander des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le paiement du préavis et de l’indemnité de licenciement voire un préjudice moral le cas échéant.
Exemple concret : Un salarié a contesté son licenciement pour faute grave après avoir été surpris en train de consulter son téléphone personnel. Les juges ont estimé que cela ne suffisait pas à caractériser une faute grave : il a obtenu 12.000 € de dommages et intérêts.
Et en cas de procédure disciplinaire préalable ?
Avant de licencier pour faute grave, l’employeur doit respecter une procédure :
- Convoquer le salarié à un entretien préalable (par lettre remise en main propre ou recommandée) ;
- Laisser un délai de 5 jours ouvrables minimum entre convocation et entretien
- Notifier la décision dans un délai d’un de 2 jours minimum après l’entretien et un mois maximum après l’entretien;
S’il ne respecte pas cela, le licenciement est irrégulier — même si la faute est reconnue, l’indemnisation est alors différente relativement à un licenciement abusif et n’est pas cumulative au demeurant.
Exemple : Un employeur notifie le licenciement dès le lendemain de l’entretien.
7. Faute grave et rupture anticipée en CDD
Dans un contrat à durée déterminée, il est normalement interdit de le rompre avant le terme, sauf faute grave ou lourde.
Mais la charge de la preuve incombe à l’employeur, et les prud’hommes sont stricts sur ce point.
Exemple : Une entreprise a rompu un CDD au motif d’un comportement « irrespectueux ». La cour d’appel a jugé que cela ne constituait pas une faute grave suffisante, et a condamné l’employeur à indemniser le salarié jusqu’à la fin théorique du contrat, ce qui peut être conséquent?
Quelle différence entre faute grave et faute lourde ?
La faute lourde implique un élément de gravité supplémentaire, à savoir l’intention de nuire du salarié, que l’employeur devra prouver.
Exemple : Un salarié détournant volontairement la clientèle de l’entreprise vers un concurrent pourra être licencié pour faute lourde, s’il est prouvé qu’il a intentionnellement nui à l’employeur.
Quelles conséquences financières ?
Un licenciement pour faute grave prive le salarié :
- De l’indemnité de licenciement (légale ou conventionnelle) ;
- Du préavis ;
Mais il conserve :
- Le solde de tout compte (congés payés, heures supplémentaires, primes dues…) ;
- L’accès à France travail : le licenciement pour faute grave n’empêche pas l’ouverture des droits au chômage.
Exemple : Une salariée licenciée pour faute grave reçoit 0€ de préavis et 0€ d’indemnité de licenciement, mais conserve ses 15 jours de congés payés, soit près de 1.200 € (le montant dépend de son salaire naturellement), et peut s’inscrire à Travail
Ce qu’il faut retenir
- La faute grave n’est pas automatique : elle doit être prouvée et proportionnée ;
- Les juges examinent le contexte et la nature des faits ;
- Un salarié peut tout à fait contester un licenciement pour faute grave ;
- Même en cas de faute reconnue, les droits fondamentaux doivent être respectés ;
Salarié(e), vous faites face à une procédure disciplinaire ou un licenciement pour faute grave ?
En tant qu’avocat en droit du travail à Paris, j’accompagne les salariés dans ce type de situation, en amont comme en contentieux. Un avis juridique peut parfois éviter un licenciement, ou au contraire permettre d’obtenir gain de cause aux prud’hommes.
Ne restez pas seul face à une telle accusation.
Ping :Mon salarié m’a enregistré à mon insu : que faire ? -