La procédure disciplinaire en droit du travail est complexe et exigeante, par conséquent, les précisions prétoriennes sont les bienvenues.
Aux termes de l’article L. 1332-2 alinéa 1er du code du travail : « Lorsque l’employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l’objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n’ayant pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié. ».
La sanction prononcée par l’employeur doit être justifiée et proportionnée par rapport à la faute commise par le Salarié.
Dans les entreprises dont l’effectif atteint au moins 50 salariés, la nature et l’échelle des sanctions disciplinaires sont fixées par le règlement intérieur.
Parmi ces sanctions, il y en a une que le Salarié peut refuser, il s’agit de celle qui emporte la modification de son contrat de travail ; c’est notamment le cas de la rétrogradation.
La rétrogradation est entendue d’un point de vue hiérarchique (classification, fonctions et donc rémunération) mais n’est pas une notion toujours aisée surtout quand on sait que la création d’un niveau intermédiaire entre un salarié et son supérieur hiérarchique n’entraîne pas, en soi, une rétrogradation (Cass. Soc., 5 mai 2009, n°07-44.898).
En effet, la rétrogradation est indissociable du droit de refus du salarié puisqu’elle implique une modification du contrat de travail du salarié qui nécessite son accord exprès (Cass. Soc., 20 avril 2017, n°15-19.979).
Lorsque l’employer notifie au salarié une rétrogradation, il lui incombe d’informer l’intéressé de sa faculté d’accepter ou de refuser cette modification (Cass. Soc., 28 avr. 2011, n°09-70.619).
En l’absence d’acceptation claire et non équivoque par le salarié de la sanction disciplinaire qui entraîne une modification de son contrat de travail, l’employeur peut prononcer, au regard de l’exercice de son pouvoir de sanction, une autre sanction aux lieu et place de la sanction refusée (Cass. Soc., 19 févr. 2003, n°00-46.188).
Attention, si l’employeur impose une rétrogradation au salarié, il épuisera son pouvoir disciplinaire et ne pourra plus par la suite, s’agissant des mêmes faits fautifs, le licencier en cas de contestation de sa rétrogradation en vertu du principe « non bis in idem » (« nul ne peut être poursuivi ou puni à raison des mêmes faits ».).
Un flou jurisprudentiel existait quant à la nécessité, en cas de refus du salarié d’être rétrogradé, de le convoquer à nouveau afin de prononcer une autre sanction que celle refusée par lui.
Depuis 2011, on sait que lorsque cette nouvelle sanction est un licenciement, l’employeur doit convoquer l’intéressé à un nouvel entretien dans le délai de prescription de deux mois prévu à l’article L. 1332-4 du code du travail (délai qui est par ailleurs interrompu par le refus du salarié de la première sanction) (Cass ; Soc., 28 avr. 2011, n°10-13.979).
Mais la jurisprudence était silencieuse lorsque la nouvelle sanction envisagée n’était pas un licenciement (même si par un raisonnement a contrario, l’on pouvait estimer qu’en cas de nouvelle sanction autre qu’un licenciement, la convocation à un nouvel entretien n’était pas péremptoire).
C’est par un récent arrêt du 25 mars 2020 publié au bulletin (Cass. Soc., 25 mars 2020, n° 18-11.433), que la Chambre sociale de la Cour de cassation a définitivement répondu à cette interrogation.
En effet, il est dorénavant établi que lorsque le salarié refuse une mesure disciplinaire emportant une modification de son contrat de travail, notifiée après un entretien préalable, l’employeur qui y substitue une sanction disciplinaire, autre qu’un licenciement, n’est pas tenu de convoquer l’intéressé à un nouvel entretien préalable.
En l’espèce, après qu’un salarié ait refusé une rétrogradation, son employeur lui a notifié aux lieux et place une mise à pied à titre disciplinaire d’une journée sans le convoquer une seconde fois.
Le salarié, sur le fondement des dispositions de l’article L. 1332-2 du code du travail rappelées ci-avant, a demandé aux juges l’annulation de ladite mise à pied en raison du défaut d’entretien préalable.
La Cour de cassation, confirmant l’arrêt d’appel, a débouté le salarié.
Par conséquent, l’entretien préalable tenu dans la perspective de la première sanction finalement non-exécutée et au cours duquel l’employeur recueille les explications du salarié est suffisant en cas de substitution de sanctions, étant entendu que la seconde sanction finalement mise en œuvre est fondée sur les mêmes faits que ceux discutés pendant ledit entretien.
Cass. Soc., 25 mars 2020, n° 18-11.433
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